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La location de courte durée est contraire à l’usage résidentiel d'une copropriété

Le 27 juillet 2018
Copropriété – obligation de respect de la destination des lots par chaque copropriétaire – incompatibilité entre la destination résidentielle d’un immeuble en copropriété et location meublée de courtes durée touristique -

Arrêt Cass 3ème Civile du 8 mars 2018 n°14-15.864

On sait que l’article L631-7 du Code de la Construction et de l’Habitation applicable aux communes de plus de 200.000 habitants et singulièrement à Paris, dispose que la location de courte durée à une clientèle de passage de logements meublés constitue un changement d’usage soumis à autorisation administrative.

La Ville de Paris ne se prive pas de poursuivre les propriétaires qui louent leur résidence principale au-delà de 4 mois par an comme les propriétaires de logements qui optent pour leur location en meublé touristique sans avoir obtenu l’autorisation d’en modifier l’usage.

On sait aussi qu’il n’est pas nécessaire pour le propriétaire d'un logement situé dans un immeuble en copropriété de justifier de l’accord de la copropriété pour solliciter les autorisations administratives exigées par les municipalités.

Les copropriétaires peuvent-ils s’opposer à la location touristique dans un immeuble ?

Les règlements de copropriétés précisent le plus généralement la destination des lots existants dans l’immeuble, par des clauses précisant les activités ou modalités d'occupation des lots. L’interprétation de ces clauses est au cœur de bien des litiges.

Jusqu’à présent, il était généralement admis par les Tribunaux que lorsque le règlement autorise l’usage des lot de logements pour l’habitation mais aussi pour un usage mixte ou professionnel (avocat, médecin etc), il devait être considéré qu'un tel règlement n'interdit pas la location meublée de courte durée, dès lors, selon le raisonnement des juges, que la nuisance occasionnée par les allers et venues des touristes traînant leurs valises vaut bien celle pouvant être induite par le passage quotidien de la clientèle des professionnels exerçant dans ces logements.

L’arrêt du 8 mars 2018 modifie la donne.

Dans ce dossier, plusieurs propriétaires de lots d’habitation avaient divisé leurs lots en « studios meublés » loués par périodes courtes, à une clientèle de passage.

Excédé par les nuisances occasionnées, le syndicat des copropriétaires a poursuivi les copropriétaires indélicats afin qu'ils soient condamnés à remettre les lots dans leur configuration d’origine et à cesser leur activité.

La Cour d’Appel, suivie par la Cour de Cassation a donné raison au syndicat des copropriétaires en estimant que l’activité commerciale poursuivie par ces propriétaires était contraire à la destination de l’immeuble, telle qu’autorisée par le règlement de copropriété.

La Cour de Cassation a ainsi relevé pour rejeter le pourvoi des propriétaires attaqués :

« Mais attendu qu’ayant retenu qu’il résultait des stipulations du règlement de copropriété que l’immeuble était principalement à usage d’habitation, avec possibilité d’usage mixte professionnel-habitation et à l’exclusion de toute activité commerciale, ce qui privilégiait son caractère résidentiel qui était confirmé, dans sa durée et sa stabilité, par l’obligation pour le copropriétaire d’aviser le syndic de l’existence d’un bail et constaté que Monsieur X et la société Y avaient installé dans les lieux des occupants pour de très brèves périodes ou même des longs séjours dans des « hôtels studios meublés » avec prestations de services, la Cour d’appel qui en a souverainement déduit que ces rotations des périodes de locations ne correspondaient pas à la destination de l’immeuble, a, par ses seuls motifs, légalement justifié sa décision ».

Dans le cas d’espèce, les propriétaires avaient divisé les appartements et les locations incluaient un service hôtelier.

Par ailleurs, le règlement de copropriété contenait une clause relativement inhabituelle imposant au bailleur d’informer le syndic de toute signature de bail.

Pour autant, il est très probable que cette jurisprudence s’appliquera à des cas d’espèce moins caricaturaux de ce qu'il ne faut pas faire.

Delphine BERTHELOT-EIFFEL

Avocat – Paris – droit immobilier