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Cautionnement ou garantie autonome : comment les distinguer ?

Le 10 novembre 2023
une garantie à première demande doit être regardée comme un cautionnement dès lors que le garant s’engage à payer ce que doit le débiteur principal et non sa propre obligation
  • Définition du cautionnement et de la garantie autonome

Le cautionnement est l’acte par lequel une personne (la caution) s’engage vis-à-vis d’un créancier de régler la dette de son débiteur en cas d’incapacité de ce dernier.

Ainsi, selon l’article 2288 du code civil, le cautionnement est l’acte par lequel la caution « se soumet, envers le créancier à satisfaire à une obligation, si le débiteur n’y satisfait pas lui-même ».

La garantie autonome définie par l’article 2321 du Code civil est :

« L'engagement par lequel le garant s'oblige, en considération d'une obligation souscrite par un tiers, à verser une somme soit à première demande, soit suivant des modalités convenues.

Le garant n'est pas tenu en cas d'abus ou de fraude manifestes du bénéficiaire ou de collusion de celui-ci avec le donneur d'ordre.

Le garant ne peut opposer aucune exception tenant à l'obligation garantie.

Sauf convention contraire, cette sûreté ne suit pas l'obligation garantie".

La principale différence entre les deux garanties tient au fait que la caution est un accessoire du contrat principal entre le débiteur et son créancier

Ainsi la caution va pouvoir, sauf renonciation expresse au bénéfice de discussion, exiger du créancier qu’il poursuive d’abord le débiteur avant d’agir à son encontre et opposer au créancier les exceptions qui auraient pu lui être opposées par le débiteur

A l’opposé, sauf fraude, le garant ne peut opposer aucune exception tenant à l’obligation garantie. Il doit exécuter son engagement dès lors que le créancier le demande dans les délais et formes prévues à l'acte et ce même en cas de procédure collective ouverte au bénéfice du débiteur.

Par ailleurs, à l'opposé du garant autonome, la caution personnes physique peut bénéficier des dispositions de l’article 2299 du Code civil qui oblige le créancier professionnel à mettre en garde la caution personne physique "lorsque l’engagement du débiteur principal est inadapté aux capacités financières de ce dernier, à peine d’être déchu de son droit contre la caution à hauteur du préjudice subi par celle-ci".

De même, la caution personne physique peut obtenir la nullité de son engagement à défaut d'avoir apposer la mention prévue à l'article 2297 du code civil selon lequel :

« A peine de nullité de son engagement, la caution personne physique appose elle-même la mention qu'elle s'engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d'un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, le cautionnement vaut pour la somme écrite en toutes lettres.

Si la caution est privée des bénéfices de discussion ou de division, elle reconnaît dans cette mention ne pouvoir exiger du créancier qu'il poursuive d'abord le débiteur ou qu'il divise ses poursuites entre les cautions. A défaut, elle conserve le droit de se prévaloir de ces bénéfices.

La personne physique qui donne mandat à autrui de se porter caution doit respecter les dispositions du présent article

Il peut ainsi être tentant pour le garant d’essayer de faire requalifier la garantie signée en cautionnement.

Critères de la distinction entre les deux garanties

La seule désignation de l’acte sous l’appellation de « garantie autonome » ou « garantie à première demande » ne suffit pas à exclure la requalification.

Ainsi, une garantie à première demande doit être regardée comme un cautionnement dès lors que le garant s’engage à payer ce que doit le débiteur principal

En conséquence, a pu être requalifié en cautionnement un acte intitulé garantie à première demande par lequel le garant avait déclaré "se porter caution solidaire et indivisible" et s'engager "irrévocablement et inconditionnellement à rembourser, en cas de défaillance de la société Biscuiterie [O] à la société Biscuil indépendamment de la validité et des effets juridiques du contrat d'approvisionnement d'huile végétale, et sans pouvoir en différer le paiement, ni soulever d'objection, d'exception ou contestation quelconque résultant dudit contrat ou d'une quelconque contestation y afférente tout montant jusqu'à concurrence de 200 000 euros »

Pour la Cour de Cassation, la Cour d’Appel avait en effet pu, sans dénaturer le contrat, retenir «  qu'en dépit de l'intitulé de l'acte et de la clause relative à l'impossibilité, pour M. [Y], de différer le paiement et de soulever des exceptions tirées des conditions d'exécution du contrat conclu entre la société Biscuiterie [O] et la société Biscuit, la garantie souscrite portait sur la dette de la première envers la seconde et que, n'étant pas autonome par rapport à cette dette, elle devait être qualifiée de cautionnement » (cass com 20 avril 2017 n°15-18.203)

 A l’opposé, la Cour de Cassation a pu retenir qu’une cour d’appel avait pu, à bon droit, refuser de requalifier une garantie autonome en cautionnement, nonobstant les mentions « solidaire et indivisible » figurant à l'acte, après avoir relevé que l’autonomie de la garantie ressortait, outre l’intitulé du contrat, de l’engagement pris par le débiteur de payer dès réception d’une demande de paiement du bénéficiaire par lettre recommandée avec accusé de réception notifiant la défaillance du donneur d’ordre avec la précision à l’acte que « bien entendu l’effectivité ou le bien fondé du manquement énoncé est totalement indifférent à l’exécution de l’engagement de garantie», que le garant "s’interdisait d’opposer une quelconque nullité, exception, objection, fin de non-recevoir tirée des relations juridiques ou d’affaires entre les deux sociétés" et que "la garantie n’était pas un cautionnement" (cass com 30 janvier 2019 n°17-21.279)