Copropriété : l’existence d’un syndicat secondaire ne se déduit pas
Cass civ 3ème, 14 mars 2019 n°18-10214
Lorsqu’une copropriété comprend deux bâtiments, il peut être tentant d’instituer le bâtiment sur cour en syndicat secondaire afin de pouvoir organiser des assemblées limitées aux seuls copropriétaires de chaque bâtiment.
Par l’arrêt susvisé, la Cour de Cassation vient de poser que « la circonstance que le règlement de copropriété prévoie des parties communes spéciales (à chaque immeuble) et que soient appelées des charges spéciales sur lesquelles seuls les copropriétaires concernés sont appelés à délibérer ne suffit pas à caractériser la création d’un syndicat secondaire des copropriétaires »
Quel est l’intérêt de la création d’un syndicat secondaire ?
Le syndicat secondaire est une personne civile distincte du syndicat principal, ayant un patrimoine propre et sa propre comptabilité.
Les copropriétaires réunis en Assemblées peuvent ainsi voter un budget propre à leur bâtiment, agir en justice pour assurer le respect du règlement de copropriété dans ses dispositions intéressant les seuls copropriétaires du bâtiment concerné (action contre un copropriétaire s’étant approprier une partie commune par exemple) ou de son propre règlement, en cas d’adoption d’un règlement spécifique à son bâtiment.
L’intérêt majeur de la création d’un syndicat secondaire tient en la possibilité pour les copropriétaires d’un bâtiment de pouvoir adopter des décisions concernant leur seul bâtiment (travaux ou dépenses d’entretien notamment) sans risquer d’être bloqués par les voix des copropriétaires des autres bâtiments détenant davantage de voix.
Le syndicat secondaire doit avoir son propre syndic (qui peut néanmoins être le même que celui du syndicat principal) et son propre conseil syndical.
En présence d’un syndicat secondaire, le syndicat principal perd son pouvoir de décision sur tout ce qui concerne le bâtiment secondaire, mais conserve le pouvoir pour tout ce qui concerne les parties communes générales (hall d’entrée, cours, espaces verts, voiries, circulations communes à l’ensemble des bâtiments, concierge, etc), les assemblées générales du syndicat principal devant dès lors réunir tous les copropriétaires, y compris ceux du syndicat secondaire à moins que ceux-ci aient mandaté le président de leur conseil syndical pour les représenter.
En effet la loi Alur a modifié l’article 22 de la loi de 1965 afin de disposer :
« L’assemblée générale d’un syndicat secondaire statuant à la majorité mentionnée à l’article 25 peut mandater, pour une durée d’un an, le Président du Conseil Syndical secondaire pour représenter les copropriétaires à l’assemblée générale du syndicat principal.
Par dérogation au I du présent article, le mandat confié au Président du Conseil syndical secondaire emporte délégation de vote de tous les copropriétaires pour les décisions inscrites à l’ordre du jour de l’assemblée générale du syndicat principal nécessitant un vote relevant de l’article 24. Pour les décisions inscrites à l’ordre du jour de l’assemblée générale du syndicat principal nécessitant la majorité mentionnée aux articles 25 ou 26 ou l’unanimité, le Président du Conseil Syndical secondaire ne peut prendre part au vote que s’il dispose d’une délibération de l’assemblée générale du syndicat secondaire se prononçant sur cette décision aux majorités requises »
Cette disposition qui vise à éviter une trop grande abstention des copropriétaires du syndicat secondaire aux assemblées du syndicat principal n’est pas sans danger, notamment en cas de recours d’un copropriétaire du syndicat secondaire contre les résolutions de l’assemblée.
Comment créer un Syndicat secondaire ?
Le texte de l’article 27 de la loi de 1965 qui institue la possibilité des syndicats secondaires lorsque l’immeuble comporte plusieurs bâtiments, prévoit la possibilité pour les copropriétaires d’un bâtiment de se réunir et d’instituer entre eux un syndicat secondaire aux conditions de la majorité de l’article 25 dont la décision s’impose alors aux copropriétaires des autres bâtiments, qui n’ont ni à être convoqués à l’assemblée constitutive, ni à recevoir notification du procès-verbal de la décision prise.
Pour autant selon la jurisprudence, il a été admis que l’existence de syndicat secondaire peut être organisée dès le début par le règlement de copropriété.
C’est ici que se place l’arrêt de la Cour de Cassation du 7 mars 2019 qui dispose que l’existence d’un syndicat secondaire suppose que le règlement de copropriété l’ait prévue explicitement, l’existence de charges spéciales à un bâtiment sur lesquelles seuls les copropriétaires concernés votent ne suffisant pas à caractériser l’existence d’un cabinet secondaire.
Maître Delphine BERTHELOT-EIFFEL
Avocat Paris - droit immobilier -