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bail commercial : indemnisation de la privation du droit au maintien du Preneur

Le 12 juillet 2020
Le fait, pour le preneur de locaux commerciaux, d'avoir été privé de son droit au maintien dans les lieux jusqu'au paiement de l'indemnité d'éviction, par le Bailleur, lui donne droit à une indemnité spécifique, distincte de l'indemnité d'éviction

Cass 3ème civile 27 février 2020 n° 18-24.986

 

Le droit au maintien dans les lieux de l’article L 145-28 du Code de Commerce

On sait que le locataire d’un bail commercial dont le bailleur refuse le renouvellement du bail a droit à une indemnité d’éviction lorsque le congé a été donné avec offre d’indemnité d’éviction, ou, lorsque le congé, ayant été donné pour motifs graves et légitimes, les juges estiment les motifs invoqués insuffisamment graves pour priver le locataire de l’indemnité d’éviction.

On sait aussi que le locataire auquel un congé a été donné, peut rester dans les locaux loués, tant que l’indemnité d’éviction n’a pas été fixée, à charge pour lui de payer une indemnité d’occupation. 

On sait enfin, que, pour autant, le Preneur n’est pas obligé de rester dans les lieux loués jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction.

L’article L145-28 du Code Commerce dispose en effet ce qui suit : 

« Aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d’éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l’avoir reçue. Jusqu’au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré. Toutefois, l’indemnité d’occupation est déterminée conformément aux dispositions des sections 6 et 7, compte tenu de tous les éléments d’appréciation »

Le droit au maintien dans les lieux n’implique pas une obligation de rester dans les lieux jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction

La jurisprudence a ainsi admis que, sauf clause contraire du bail, le preneur n’est pas tenu de rester dans les lieux jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction, lorsque le renouvellement du bail lui a été refusé (Cass civil 13 juillet 1994 n°92-10.536)

Il peut donc quitter les lieux sans perdre son droit à l'indemnité d’éviction

A l’inverse, le bailleur qui, par son comportement, oblige le preneur a quitter les lieux loués sans attendre le paiement de l'indemnité d'éviction commet une faute indemnisable 

Le fait pour un Bailleur d’avoir privé le Preneur de son droit au maintien dans les lieux en le contraignant à rendre les locaux loués donne droit à  une indemnité spécifique distincte de l’indemnité d’éviction

C’est le sens de l'arrêt rendu par la Cour de Cassation.

Dans cette affaire en effet, le bailleur avait poussé son locataire à quitter les lieux loués immédiatement après la date d'effet du congé en dégradant les locaux loués.

La Cour de Cassation a ainsi estimé que privé de son droit au maintien dans les lieux loués par le comportement du bailleur, le preneur avait droit une double indemnités : l'indemnité d'éviction destinée à compenser la perte de son fonds de commerce et une indemnité destinée à réparer le préjudice commercial résultant de la perte de son droit au maintien dans les lieux entre la date d'effet du congé et la date de versement de l'indemnité d'éviction.

Delphine BERTHELOT-EIFFEL 

Avocat Paris