Bail commercial : attention à l’engagement du locataire à « faire son affaire personnelle »
Arrêt Cour de Cassation 3ème civile 11 octobre 2018 n°17-18553
L'engagement d'un locataire à faire son affaire personnelle de toutes les démarches en vue d'obtenir le branchement des locaux aux réseaux ne vaut pas engagement de faire les travaux à ses frais
Il est fréquent de prévoir dans les baux, l’engagement du locataire de faire son affaire personnelle de telle ou telle situation. Par exemple dans le cas soumis à la Cour de Cassation de « faire son affaire personnelle de toutes démarches en vue d’obtenir les branchements des équipements et installations de toute nature nécessaires à l’exercice de son activité »
Ce même bail prévoyait classiquement que le locataire acceptait de « prendre les locaux dans l’état où ils se trouvaient lors de son entrée en jouissance sans pouvoir exiger de travaux de quelque nature que ce soit, ni remise en état de la part du bailleur » et comportait une déclaration du locataire selon laquelle il avait une parfaite connaissance des équipements des locaux.
Enfin le bail reconnaissait au preneur une franchise de loyer en contrepartie des travaux à réaliser.
Ayant rencontré des difficultés lors des travaux de raccordement des locaux au réseau d’évacuation des eaux usées, le locataire avait sollicité la condamnation du bailleur pour manquement à son obligation de délivrance du fait de l’absence de raccordement des locaux au réseau d’eau usée ainsi qu’au réseau électrique, mais avait été débouté, tant par les premiers juges, que par la Cour d’Appel.
Pour les juges, l’acceptation du locataire de prendre les locaux en l’état ne pouvait certes pas suffire à décharger le bailleur de son obligation de délivrance, la jurisprudence l’ayant déjà confirmé à plusieurs reprises, toutefois, les clauses rappelées ci-dessus ayant transféré la charge du raccordement du local sur le locataire, ce dernier ne pouvait prétendre à un manquement du bailleur.
L'obligation du bailleur de délivrer des locaux raccordés aux réseaux d'eaux et d'électricité ne peut être transférée sur le locataire que par une clause expresse mettant la réalisation des travaux de raccordement à sa charge.
La Cour de Cassation casse l’arrêt, en estimant qu’en absence de clause expresse du bail mettant sans ambiguïté le coût des travaux à la charge du locataire, la clause telle que rédigée pouvait être lue comme reportant sur le locataire les questions administratives relatives aux abonnements mais pas la charges des travaux eux-mêmes et ne pouvait donc pas décharger le bailleur de son obligation de délivrer au locataire des locaux raccordés aux réseaux d’eau usée et électriques
La rédaction des baux commerciaux suppose un attention particulière
Faire appel à un avocat compétent en droit des baux commerciaux est une précaution nécessaire
Delphine Berthelot-Eiffel
Avocat 0604531992