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Notification des promesses et compromis de vente : éviter les pièges

Le 20 décembre 2020
Comment éviter les pièces de la notification des promesses de vente d'un bien à usage d'habitation à un acquéreur non professionnel, point de départ du droit de rétractation prévu à l'article L271-1 du Code de la Construction et de l'habitation

Les textes applicables

La notification des promesses et compromis de vente, et celle des actes de vente passés sans avant-contrat, est prévue par les articles L271-1 et L271-2 du Code de la Construction et de l’Habitation et vise à permettre à l’acquéreur non professionnel d’un immeuble d’habitation de se rétracter dans un délai de 10 jours sans avoir à payer la moindre indemnité au vendeur.

L’acquéreur non professionnel d’un immeuble d’habitation

La notification n’a lieu d’être que lorsque l’acquéreur n’est pas un professionnel de l’immobilier (marchand de biens ou loueur professionnel par exemple)

L’article L271-1 ne distingue pas selon que l’acquéreur est un particulier ou une personne morale mais en pratique la jurisprudence considère que doit être considérée comme un professionnel, la SCI dont l’objet social est « l’acquisition, l’administration et la gestion par la location ou autrement, de tous immeubles et biens immobiliers meublés et aménagés (Cass Civ 24 octobre 2012 n°11-18774) ou la SCI familiale constituée pour l’acquisition d’une résidence secondaire (Cass  Civ 16 septembre 2014 n°13-20002)

La notification n’a lieu d’être que lorsque l’acquisition porte sur un bien destiné à l’habitation, sans qu’il importe qu’il s’agisse d’une résidence principale, d’une résidence secondaire, d’un immeuble destiné à être loué (sauf pour le loueur professionnel), de l’acquisition d’un bien existant ou d’une acquisition en l’état futur d’achèvement.

Il n’y a pas non plus lieu à notification d’une promesse portant sur l’acquisition d’un bien mixte (Cass Civ 30 janvier 2008 n°06-21145) ou d’un terrain à bâtir non inclus dans un lotissement, peu important dans ce cas, que l’acquéreur ait l’intention d’y bâtir une habitation ou que la promesse ait été signée sous condition suspensive de l’obtention d’un permis de construire une habitation (Cass Civ 4 Février 2016 n°14-21873)

Attention : Quand bien même le bien acquis a été construit pour une autre destination que l’habitation, il y a lieu à notification dès lors que l’acquéreur déclare le destiner à un usage d’habitation ou qu’il est désigné, à la promesse, comme étant à usage d’habitation, alors même qu’il comportait un commerce en rez-de-chaussée (Cass Civ 12 octobre 2017 n°16-22416)

Une acquisition via une promesse, un compromis ou un acte de vente sans avant contrat 

La purge du droit de rétractation ouvert par l’article L 271-1 du CCH doit être mise en œuvre au stade de la promesse ou du compromis de vente. Elle doit également l’être en cas de vente « directe », non précédée par un avant contrat, l’acquéreur bénéficiant alors d’un délai de réflexion de 10 jours pour renoncer à son achat

Il n’y a par contre pas de possibilité de rétractation en cas de vente aux enchères.

A noter : Une nouvelle notification s’impose en cas modification substantielle dans les conditions de la vente entrainant la signature d’un avenant (modification portant sur le prix, sur désignation ou la consistance du bien, sur l’existence d’une servitude non mentionnée à la promesse et découverte par la suite, sur l’existence d’un procès, sur la présence d’amiante dévoilée après la promesse, sur une non-conformité du bien par rapport aux règles d’urbanisme)

Toutefois, la découverte, postérieurement à la signature de la promesse portant sur l’acquisition d’un chalet entouré de parcelles situées en zone constructible, du fait que certaines de ces parcelles n’étaient pas constructibles, n’a pas été considérée comme constituant une modification substantielle qui aurait nécessité la reconnaissance au profit de l’acquéreur d’un nouveau droit de rétractation, dès lors que, dans le cas d’espèce, l’acquéreur avait déclaré vouloir affecter son acquisition à sa résidence principale ou secondaire ou à usage locatif d’habitation. (cass 26 septembre 2007 n°06-17.187)

N’a pas non plus été considérée comme constituant une modification substantielle, la modification de la répartition du prix de vente, entre la part affectée au prix du bien immobilier acquis et la part affectée au prix des meubles s’y trouvant.

Forme de la notification

La notification s’effectue par l’envoi de la promesse unilatérale ou synallagmatique de vente ou de l’acte authentique de vente (lorsqu’il n’y pas eu d’avant contrat) à l’acquéreur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par « tout autre moyen présentant des garanties équivalentes pour détermination de la date de réception ou de remise »

La notification peut donc être faite par lettre RAR classique, par lettre recommandée électronique, ou par exploit d’huissier.

A noter : Dès lors que l’acte notifié mentionne les conditions d’exercice du droit de rétractation, la notification peut être effectuée sans lettre d’accompagnement (Cass Civ 9 juillet 2020 n°19-18.943). Par ailleurs, la lettre d’accompagnement, lorsqu’elle est faite, n’a pas à mentionner la faculté de rétractation (Cass Civ 2 juin 2016 n°15-17833)

Lorsque l’acte a été établi par l’intermédiaire d’un professionnel ayant reçu mandat pour prêter son concours à la vente (notaire, agent immobilier), la notification peut s’effectuer par remise de l’acte en mains propres

Attention : Dans ce cas, l’acte remis doit reproduire le texte de l’article L 271-2 du CCH et contenir à l’acte même, les mentions suivantes de la main du ou des acquéreurs :

« Remis par (nom du professionnel) à (lieu) le (date) » et

« Je déclare avoir connaissance qu’un délai de rétractation de dix jours m’est accordé par l’article 271-1 du Code de la Construction et de l’habitation, et qu’il court à compter du lendemain de la date de remise inscrite de ma main sur le présent acte, soit à compter du ... »

La remise en mains propres contre récépissé, même signé et daté de la main de l’acquéreur, n’est donc pas valable (Cass Civ 3 juillet 2003 n°11.303/07.11.936)

Destinataires de la notification

En cas de pluralité d’acquéreurs et en absence de procuration donnée à un tiers par tous les acquéreurs pour recevoir la notification, celle-ci doit être effectuée à chaque acquéreur séparément, y compris lorsque les acquéreurs sont mariés.

Ainsi chaque acquéreur doit être destinataire du courrier recommandé avec demande d’avis de réception, postale ou électronique ou reproduire à l’acte les mentions manuscrites rappelées ci- dessus

Attention : si la notification faite par lettre fait courir les délais à compter de la première présentation, même lorsqu’elle n’est pas réclamée (Cass 1ère civile du 14 février 2018 n°17-10.514) la notification n’est pas valable lorsque l’accusé de réception n’a pas été signé par son destinataire.

Ainsi, la signature de l’accusé de réception par la mère de l’acquéreur, non présent lors du passage du facteur, rend la notification faite à son fils irrégulière (Cass Civ 12 octobre 2017 n°16-22416). Idem pour l’accusé de réception signé par l’époux de la destinataire, ayant signé, en même temps, l’accusé de réception de la notification qui lui était faite et celui de la notification faite à son épouse (Cass Civ 21 mars 2019 n° 18-10.772)

A noter : La procuration donnée par des acquéreurs (en l’espèce des époux) à un tiers (en l’espèce leur fille) lui donnant pouvoir de prendre en leur nom « toutes décisions relatives à l’achat » d’un bien permet au mandataire de signer valablement l’accusé de réception du courrier de notification, les acquéreurs étant dès lors privés de la possibilité de se rétracter à l’expiration du délai de 10 jours. (Cass Civ 2 juin 2016 n°15-17833)

Effets de la notification

La notification ouvre le délai de 10 jours reconnu à l’acheteur pour se rétracter librement, sans pénalité.

Le délai de 10 jours court à compter du lendemain de la première présentation de la lettre recommandée postale, à compter du lendemain de son envoi en cas de lettre recommandée électronique et à compter du lendemain de la signature de la promesse ou de la vente (à défaut d’avant contrat) en cas de remis en mains propres.

Le délai expirant un samedi, un dimanche ou un jour férié est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant (Cour Cass 5 décembre 2007 n°06-19567)

Sanction de la nullité ou de l’absence fautive de la notification

Ne pas correctement notifier une promesse ou un compromis revient à ne pas purger le droit de rétractation dans les jours suivant la signature de l’avant-contrat et permet ainsi à l’acquéreur de se rétracter jusqu’au jour de la signature de l’acte de vente, de refuser de signer l’acte de vente ou même de ne pas se présenter à la signature sans risquer d’avoir à payer la moindre indemnité au vendeur.

L’agent immobilier qui, par sa négligence, n’a pas correctement notifié l’avant contrat signé par son intermédiaire engage ainsi sa responsabilité vis-à-vis du vendeur. Il en a été ainsi notamment pour l’agent immobilier qui n’avait pas vu, au retour des accusés de réception signés par le mari, que ces deux accusés de réception comportaient la même signature.

De même engagerait sa responsabilité l’agent immobilier qui aurait omis à tort de ne pas purger le droit de rétractation d’un acquéreur pouvant en bénéficier.

Delphine BERTHELOT EIFFEL 

Avocat - article à paraître dans l'Activité Immobilière